« L’émeute gronde à nos portes. Que les consuls prennent garde, afin que la république n’éprouve aucun dommage ». Des mots que le sénat romain prononçait, en temps de crise, quand il accordait aux consuls les pleins pouvoirs. J’ai aujourd’hui l’impression de les entendre dits et répétés, depuis des mois, par le président de la République Michel Sleimane, le président du Parlement Nabih Berry et le député Walid Joumblatt… chacun à sa façon.
Le Chariot avant le bœuf
Le fait de designer le député de Beyrouth, le chef acclamé d’une majorité parlementaire, Saadeddine Al-Hariri comme futur président du Conseil des ministres, chargé depuis la mi-juin de former le nouveau gouvernement, ne suffit point pour rassurer la classe politique et le peuple libanais. Le fait de choisir des ministres jouissant d’une certaine popularité ou d’une quelconque compétence, ne suffit pas non plus pour mériter la confiance d’un peuple meurtri et divisé.
Le commun des mortels
Or le commun des mortels ne se soucie guère de voir tel député ou tel homme d’affaires intégrer le nouveau gouvernement qui traine le pas. Il voit surtout la déficience de son pouvoir d’achat malgré la dernière augmentation survenue après dix ans d’immobilisme et de mépris. Il patiente et souhaite entendre de la bouche du nouveau chef de l’exécutif une déclaration solennelle, dans laquelle il expose sa politique de reforme indispensable et inévitable pour sauver ce petit pays et rétablir la paix civile au sein d’un peuple qui a trop souffert durant ces quarante années passées.
N’étaient-ils pas beaux ?
Qui n’a pas remarqué la cravate club orange de Saad Al-Hariri, et celle bleue de Michel Aoun, lors de leur dernière rencontre ? N’étaient-ils pas beaux en ce jour béni, affichant un aimable et tendre sourire, et effectuant une déclaration pondérée à la presse ? Je me demande s’ils savaient que leur bonne conduite allait refléter l’ambiance chaleureuse qui a régné, sur les « retrouvailles » à Damas entre le roi Abdallah d’Arabie Saoudite et le président syrien Bachar al-Assad ? Il faut cesser de déshabiller saint Pierre pour habiller saint Paul. « Celui qui ne sait pas dissimuler ne sait pas régner », disait souvent le roi Louis XI. C’est bien vrai, mais pas pour les temps, surtout pas chez les Levantins. (9.10.2009)