La raison, c’est l’intelligence choisissant la sagesse (Macchabées IV). La raison est une arme plus pénétrante que le fer (Phocylide de Milet VIe s. av. J.C.). Autrement dit. L’oiseau se défend par son vol, le lion par sa force, le taureau par ses cornes, l’abeille par son aiguillon, l’homme par sa raison. Ce n’est point être vaincu que de se rendre à la raison (Chevalier de Méré 1687). Il n’appartient qu’aux âmes privilégiées de raisonner toujours juste (Démocrate, Sentences d’or, 77, sous le règne d’Auguste).
Pour avoir séjourné et vécu vingt et un ans en France, de Strasbourg à Paris en passant par Aix-en-Provence, où j’ai participé à la création du mouvement Justice et Paix en Palestine, fréquenté le restaurant universitaire juif Laure Weil, rencontré et dialogué avec des rabbins, écouté maintes fois le discours pastoral du Monseigneur Lustiger évêque de Paris, milité au sein de l’Association de Solidarité Franco-arabe, travaillé sous la direction de mon professeur Emile Témime, dialogué avec l’historien de l’antisémitisme Léon Poliakov, côtoyé des « juifs français et arabes » de toutes les tendances, les Chardac, les Guedj, les Rebot, les Timsit, les Gassmann, les Bidermann, et bien d’autres rencontres intéressantes et fructueuses que je me réserve de citer ici, comme celles avec l’ex-directeur du Bureau de la ligue Arabe à Paris le tunisien Hamadi Essid, ou bien avec l’artiste et écrivain palestinien Ibrahim Essouss directeur du Bureau de l’OLP à Paris…, pour avoir pénétré l’âme de tous ceux qui ont souffert et continuent de souffrir d’une « justice » fondée sur les mensonges, les mythes et autres légendes, j’ai fini par penser comme Henri IV que « le meilleur moyen de se défaire d’un ennemi est d’en faire un ami », et d’admettre que « je n’ai pas d’ennemis quand ils sont malheureux » selon Voltaire. C’est pour tout cela j’adhère à l’Appel qui suit, avec mon profond souhait de voir cette courageuse initiative, progresser, évoluer et réaliser ses objectifs: une paix juste et globale.
Appel à la raison*
Citoyens de pays européens, juifs, nous sommes impliqués dans la vie politique et sociale de nos pays respectifs. Quels que soient nos itinéraires personnels, le lien à l’État d’Israël fait partie de notre identité. L’avenir et la sécurité de cet État auquel nous sommes indéfectiblement attachés nous préoccupent. Or, nous voyons que l’existence d’Israël est à nouveau en danger. Loin de sous-estimer la menace de ses ennemis extérieurs, nous savons que ce danger se trouve aussi dans l’occupation et la poursuite ininterrompue des implantations en Cisjordanie et dans les quartiers arabes de Jérusalem Est, qui sont une erreur politique et une faute morale. Et qui alimentent, en outre, un processus de délégitimation inacceptable d’Israël en tant qu’État. C’est pourquoi nous avons décidé de nous mobiliser autour des principes suivants : L’avenir d’Israël passe nécessairement par l’établissement d’une paix avec le peuple palestinien selon le principe « deux Peuples, deux États ». Nous le savons tous, il y a urgence. Bientôt Israël sera confronté à une alternative désastreuse : soit devenir un État où les Juifs seraient minoritaires dans leur propre pays ; soit mettre en place un régime qui déshonorerait Israël et le transformerait en une arène de guerre civile. Il importe donc que l’Union Européenne, comme les États-Unis, fasse pression sur les deux parties et les aide à parvenir à un règlement raisonnable et rapide du conflit israélo-palestinien. L’Europe, par son histoire, a des responsabilités dans cette région du monde. Si la décision ultime appartient au peuple souverain d’Israël, la solidarité des Juifs de la Diaspora leur impose d’œuvrer pour que cette décision soit la bonne. L’alignement systématique sur la politique du gouvernement israélien est dangereux car il va à l’encontre des intérêts véritables de l’État d’Israël. Nous voulons créer un mouvement européen capable de faire entendre la voix de la raison à tous. Ce mouvement se veut au-dessus des clivages partisans. Il a pour ambition d’œuvrer à la survie d’Israël en tant qu’État juif et démocratique, laquelle est conditionnée par la création d’un État palestinien souverain et viable. C’est dans cet esprit que nous appelons tous ceux qui se reconnaissent dans ces principes à signer et à faire signer cet appel. * (8.5.2010)