Ekaterina Kovrikova, la meneuse…

 

Inlassablement vive, vigoureuse, et généreuse, toujours radieuse et émouvante, Ekaterina Kovrikova était l’invitée cette semaine de la Municipalités de Tripoli et de la Municipalité de Jounié, pour prouver en quelque sorte, qu’elle est toujours fidèle à sa mission : renouer avec un public déjà séduit et conquérir d’autres libanais épris de musique classique. Le Maire de Tripoli, M. Rachid Jamali, était sincère quand il a salué chez Kovrikova son amour pour la musique et son attachement au pays du cèdre. Ainsi, il a rejoint Walid Gholmiyé le directeur général du Conservatoire nationale, Abdou Kahi le directeur du LCSR-NDU, le Doyen Mme Hoda Nehmé, et bien d’autres spécialistes, qui ont pu apprécier maintes fois, les qualités artistiques et humaines de Katerina Kovrikova.

Des plus célèbres et aux moins célèbres

Dans ses bagages elle a bien rangé ses trophées russes, européens et arabes depuis 1993, ainsi que son titre de professeur émérite depuis 2001. Malgré la richesse de son répertoire qui n’exclut aucun compositeur parmi les plus célèbres et les moins célèbres, son programme comprenait des morceaux intelligemment choisis chez P. Tchaïkovski, M. Pletniov, S. Rachmaninov, A. Klyucharev, R. Yakhin, N. Paganini-F. List, F. Schubert-F. List, R Schuman, A. Mozart, F. Chopin, N. Rimski-Korsakov, A. Khatchatourian, Moussorgski, V. Vlasov, S. Saidachev et Mili Balakirev.

Merci Ekaterina… Merci d’exister

Une fois de plus, Ekaterina a réussi son pari avec plus de grandeur, plus de brio et autant de virtuosité, que ce soit avec la Rondo on the festival de Rustom Yakhin, le Bachkir  dance d’Alexandre Klyucharev, la Campanella de Paganini-List, la Sérénade matinale de Schubert-List, ou bien avec la Mélodie de l’est de César Kuî, le Yadran dinguez  de S. Saidachev-Renat Yenikeev, et Islamey de Mili Balakirev. L’appartenance spirituelle de la plupart de ces compositeurs à ce grand Orient, si riche en couleurs et en parfums, reproduisait ce penchant chez Ekaterina Kovrikova pour le dialogue entre les peuples et les échanges artistique et culturel entre les nations. Je pense qu’elle s’est fixé un défi, un objectif : concilier le temporel avec le spirituel, contenter les profanes et combler les initiés. Merci Katerina… merci d’exister. (27.3.2010)

Quand le laid est aussi beau que le beau

 

Elle refuse de grandir pour ne pas souffrir ou faire souffrir, pour ne pas mentir ou devenir hypocrite, comme la plupart des adultes, pour rester pure dans un monde plongé dans le pathétique, pour continuer à se donner jusqu’à la fin des temps…, enfin pour ne pas perdre, d’une façon ou d’une autre, la mémoire des temps passés à la recherche du Moi, de l’Autre, du vrai, du faux, du beau, du laid, dans la mesure où tout le monde est beau, tout le monde est gentil…! Est-ce que le laid peut-il être aussi beau que le beau ? Rasha Shammas l’a prouvé, et avec brio, dans un recueil contenant cent quarante six photos d’art ; peut-être par ce qu’elle croit comme Carlos, que l’amour rend beau, le laid.

 

Elle a osé

Et pour cela elle a sollicité toute la technicité qu’offre l’art photographique. Elle a osé, fouillé et farfouillé dans l’esthétique du corps humain à la recherche de tous les tabous, du nombril jusqu’à la moelle épinière, en divulguant de la sorte, le narcissisme inné, que nous tenons souvent à cacher, avant de surprendre les uns ou méduser les autres.

Rasha, pour celui qui ne le sait pas, a reçu de sa mère, la styliste Sonia Farès, comme cadeau d’anniversaire pour ses neuf ans, un appareil photo qu’elle n’a plus lâché. Et vite, elle a adopté cet art pour exprimer ses sentiments, ses émotions et ses impressions. En juin 2007 elle s’est rendue à la galerie Surface Libre à Antelias, pour exposer ses œuvres, où la nature morte-vivante était son thème principal.

L’œil de Rasha n’a pas changé de vision, ni de conception : montrer que l’ordinaire est aussi beau que l’extraordinaire, que le laid est aussi beau que le beau, que le simple détail, même un petit tatou, compte et bouleverse toutes les donnes et les perspectives. Elle a choisi le noir pour libérer le blanc et transmettre le message. Ainsi beaucoup d’hommes et de femmes vont sûrement se retrouver dans ses clichés. (11.6. 2010)

 

Penser c’est philosopher

Souheil* est une étoile filante qui a choisi tôt de remonter le temps à la recherche d’une forme de joie, fruit de nos six sens. Enfanté au pied d’un minaret (Mine yara) il a écouté et examiné presque tous les discours des ancêtres, précurseurs et autres annonciateurs. Il a fait le grand choix quand il s’est envolé un jour vers les plaines de la Russie. Depuis ce jour-là il assume brillamment son destin.

Il s’est promené longtemps, le long de ses fleuves sans confondre la Volga avec la Polka ou bien la vodka. Il a pris tout son temps à fixer les visages et pénétrer l’âme d’un peuple riche, vigoureux et attachant. Il a goûté au spirituel, savouré le profane, apprécié le temporel, et œuvré pour une humanité sans frontières. Souheil pense que la philosophie a enfanté toutes les sciences et engendré toutes les civilisations. En effet penser c’est philosopher. Philosopher c’est rêver. Rêver c’est imaginer un monde nouveau, un monde meilleur. Philosopher c’est aussi dialoguer. Dialoguer c’est retrouver l’âme sœur sinon réduire toutes les différences avec les autres, et vivre en paix. Croire en un seul Dieu tout puissant et miséricordieux, nous oblige à partir inlassablement à la recherche du vrai, du juste, du beau et du bon. Seuls les fainéants, les traînards et les démissionnaires abdiquent et renoncent.

* Souheil Farah, chercheur, professeur de philosophie à UL (1.7. 2009)