Ramadane et le Carême ne suffisent plus pour stimuler l’âme et calmer les esprits. Les uns s’excusent, d’autres accusent. Mais qui s’excuse s’accuse, et doit faire de son mieux pour se faire pardonner. Tout le monde accuse, alors que le banc des accusés est vide. Selon M. Feghalli (in Proverbes syro-libanais 1938), on raconte que le Calife Haroun al-Rachid, se promenant un jour avec le poète et parodiste Abou Nouas, demanda à celui-ci de lui expliquer le sens du dicton « l’excuse est pire que la faute ». S’approchant alors du Calife, avec un sourire malicieux, Abou Nouas le pinça au bras. Le Calife vexé de cette familiarité, lui dit « n’es-tu pas fou de te permettre une pareille liberté avec moi ? ». « Pardon prince des croyants, lui dit Abou Nouas, mais j’avais oublié que c’était vous. Je pensais avoir pincé la princesse ». « Misérable ! C’est donc là ton excuse, hurla le Calife. Mais elle est pire que la faute ». « Il y a un instant, répliqua Abou Nouas, vous m’avez demandé de trouver une excuse pire que la faute. Je viens de vous la donner. Suis-je coupable de vous avoir obéi ? »
L’Etat populaire
Le pire des Etats, c’est l’Etat populaire, selon Corneille (in Cinna 1640). Or, mise à part l’ex-Président Fouad Chéhab, presque tous les hommes politiques libanais ont œuvré pour l’instauration d’un Etat populaire qui a empêché effectivement l’établissement de l’Etat de droit depuis 1943 jusqu’à nos jours. Et selon Cervantès «ce n’est pas la charge, mais l’excès de charge qui tue la bête» (in Don Quichotte 1615). Il faut finir par faire la part des choses, entre l’excès et la modération, le nécessaire et le superflu, la mesure et la démesure, le beaucoup et le peu, si nos politiciens désireraient réellement sauver le pays et nous délivrer de nos propres misères. «Il faut abattre l’arbre qui donne trop ou pas assez d’ombre», disent les Russes.
Ambition et vengeance
Nos politiciens nous ont abîmé le tympan et ont pourri nos cœurs depuis des décennies avec leur sérénade sin-sin (Syrie-Arabie Saoudite) et I-I (Israël-Iran), et nous ont entrainé, pour ne pas dire enfoncé, dans leurs querelles, supposées chrétienne-musulmane ou bien sunnite-chiite. Leurs débats sont plutôt tordus et nauséeux. Les couleurs de leurs étendards et autres fanions sont devenues fades. Ils sont partagés entre leur ambition et leur esprit de vengeance. Mais l’ambition et la vengeance ont toujours faim, disent les Danois.
La confusion
« Certains gens échangent leur honneur contre les honneurs », nous dit Alphonse Karr (les Guêpes, juin 1842) alors que son contemporain le poète français Alfred de Vigny définie l’honneur comme étant la poésie du devoir. Avons-nous perdu le goût de la poésie ou bien allons-nous continuer à vivre dans cette confusion… ? (18.9.2009)