Depuis une semaine la presse occidentale focalise sur le dernier tango brésilien, orchestré à Téhéran par le maestro Luiz Ignacio Lula da Silva, et le grand distributeur-compositeur Rajab Tayeb Erdogan, tous les deux soucieux de sortir le monde entier du guêpier iranien, et apaiser les esprits. Et ce, pendant que les armées de l’Occident traquent en vain les talibans en Afghanistan et les compagnons de l’énigmatique Oussama Ben Laden, disséminés aux quatre coins du monde.
Les réactions
Le porte-parole du secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-Moon a admis que cet accord était encourageant, en avisant que Téhéran devait malgré tout, se conformer aux résolutions du Conseil de sécurité. Sinon l’ONU perdra, en quelque sorte, sa raison d’être, surtout quand le ministre des affaires étrangères turc juge qu’ « il n’y a plus besoin de sanctions » contre l’Iran, et quand le ministre des affaires étrangères brésilien, avise que l’accord de Téhéran démontre notoirement que le « temps est toujours à la diplomatie et la négociation ».
Catherine Ashton la chef de la diplomatie européenne, trouve que l’accord répondait « partiellement » aux demandes de l’AIEA, soutenue par les gouvernements français et allemand qui ont avisé que cette « entente » ne pouvait remplacer un accord entre Téhéran et l’AIEA.
Le Britannique Alistair Burt, secrétaire d’Etat aux affaires étrangères, a déclaré dans un communiqué : « L’Iran a l’obligation d’assurer la communauté internationale de ses intentions pacifiques ». De point de vue britannique, »L’Iran reste une sérieuse source d’inquiétude« , rejoignant ainsi le président de l’Union européenne, Herman Van Rompuy, dans sa récente déclaration: « Notre position n’a pas changé, nous sommes très préoccupés par le programme nucléaire iranien« …
« Nous prenons acte des efforts consentis par la Turquie et le Brésil« , selon Robert Gibbs, le porte-parole de la Maison Blanche, soulignant toutefois que l’accord de Téhéran devait être « soumis à l’AIEA avant être évaluée par la communauté internationale« (…). Le voisin russe, le président Dimitri Medvedev a rejoint la position américaine en déclarant qu’ « Il faut saluer ce qui a été accompli par le Brésil et la Turquie« , et qu’ « Il faut mener des consultations immédiates avec toutes les parties intéressées y compris l’Iran« . Le gouvernement d’Israël dénonce ce qu’il appelle » les manœuvres » de Téhéran et accuse: « Les Iraniens ont manipulé la Turquie et le Brésil« . Il pense néanmoins que cet accord va « singulièrement compliquer les choses« .
Albaradaï
Dans une déclaration récente sur France 24, Mohamad Albaradaï l’ex-directeur de l’Agence Internationale de l’Energie Atomique, croit « qu’il s’agit d’un bon accord« , rappelant qu’il a « toujours dit que la résolution du dossier iranien passait par l’instauration d’un climat de confiance »… Il assure que « Le régime iranien est prêt à discuter« , et confirme « que Barack Obama est prêt à discuter (…) en se référant à ses entretiens, il y a quelques mois, avec ces deux chefs d’État (Ahmadinejad et Obama). « Bien sûr, aucune partie ne veut céder du terrain avant les négociations, mais je crois que les deux sont déterminés à négocier. Et je crois qu’avec cet accord, les conditions sont réunies pour s’engager dans des négociations globales« , selon M. Albaradeï, l’ancien patron de l’AIEA.
Les pays émergents
Depuis l’éclatement de la crise monétaire mondiale il y a deux ans, et l’élargissement inévitable du G8, les grandes puissances, en particulier les puissances européennes, voient d’un mauvais œil l’émergence d’une bonne dizaine d’états, tel le Brésil, l’Iran, l’Inde, le Pakistan, l’Arabie Saoudite, la Turquie, la Malaisie… qui luttent pour faire valoir leur droit et leur puissance. Or, les Etats-Unis d’Amérique, la Russie et la Chine malgré ses nuances, se cachent malicieusement derrière l’initiative entreprise par le Brésil et la Turquie, et qui a abouti à la conclusion de l’accord de Téhéran, selon les observateurs avisés. Dernièrement, vers la mi-février, le célèbre International Herald tribune préconisait dans son éditorial : « Si le conseil de sécurité de l’ONU ne parvient pas à s’entendre sur des sanctions, il faudra que les Etats Unis et ses alliés prennent des sanctions de leur côté… Trop c’est trop. Il faut que l’Iran comprenne que son enrichissement aura un coût« , avant de recommander: « L’Iran est suffisamment déstabilisé en ce moment pour que les sanctions aient de l’effet… Il faut que les Etats-Unis et leurs alliés préparent dès maintenant leur plan B « . Mais qui va pouvoir déterminer le volume et la qualité de ce coût… ? (21 mai 2010)